TDAH et Troubles alimentaires

Quel lien entre le TDAH et les troubles alimentaires ?

Les études montrent un lien important entre la problématique du trouble de l’attention et les troubles alimentaires. Ainsi, une attention particulière semble être de mise lors de troubles alimentaires, particulièrement pour la boulimie, l’hyperphagie ou l’obésité.

TDAH de quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’un trouble neurodéveloppemental se développant majoritairement chez l’enfant et perdurant la plupart du temps à l’âge adulte. Il implique deux aspects principaux :

  • des difficultés d’attention (oubli, distraction, difficulté à maintenir son attention, impression d’être dépassé, difficulté à réaliser des tâches quotidiennes à cause d’une difficulté de concentration, difficulté de suivre une conversation à cause d’une importante distraction, besoin de planifier…)
  • de l’impulsivité

Pour un diagnostic en tant que tel, il est nécessaire de se rapprocher d’un psychiatre spécialisé. Les échelles de Connors permettent d’évaluer le trouble.

TDAH et critiques

Le TDAH connaît plusieurs critiques, notamment sur le fait qu’il serait sur ou sous diagnostiqué et qu’il ne prendrait pas en compte d’autres aspects psychologiques importants. Par exemple, l’anxiété, les troubles du sommeil ou la dépression peuvent amener des symptômes proches.

Cependant, les études semblent mettre en lumière une spécificité de certaines parties du cerveau dans le TDAH (réseau neuronal frontostriatal). Ainsi, il semble important d’être juste et précis sur cette problématique, ni l’écarter purement et simplement, ni la considérer comme une étiquette a priori.

TDAH et Troubles alimentaires : implication et prise en charge

Les études démontrent des liens important entre le TDAH et les troubles alimentaires. Le TDAH entraîne une difficulté émotionnelle au coeur du fonctionnement des troubles alimentaires. L’impulsivité favorise les conduites hyperphagiques et boulimiques.

Prendre en charge le TDAH, soit avec des stratégies adaptées, soit de manière médicamenteuse peut permettre d’améliorer la situation. Ainsi, les traitements visant le TDAH a des résultats importants pour diminuer les crises alimentaires et soutenir une amélioration de la santé dans l’obésité.

Un élément clef, la dopamine

La dopamine est une hormone clef, impliqué dans la sensation de « récompense » et dans l’impulsivité. Ainsi, des traitements spécifiques agissant sur le cycle de la dopamine permet une amélioration des symptômes du TDAH, tout autant que ceux alimentaires.

Aux Etats-Unis par exemple, ce type de traitement est mis en place lors de crise hyperphagiques et pour soutenir le travail contre l’obésité. Les résultats de ces traitements sont positifs et montrent une réduction des crises alimentaires et une meilleure gestion de l’obésité.

Conclusion

Le TDAH est une pathologie très fortement liée aux troubles alimentaires. En cas de doute, il convient de ne pas négliger d’en parler à son professionnel de santé. La réduction des symptômes du TDAH peuvent être un soutient important pour réduire les difficultés liées aux troubles alimentaires.

Sources :

Laffitte-Forsans, M. (2022). Trouble Déficit de l’Attention avec ou sans Hyperactivité, Troubles des Conduites Alimentaires, Surpoids et Obésité: Association, Enjeux diagnostiques et thérapeutiques (Doctoral dissertation).

Emond, V., Joyal, C., & Poissant, H. (2009). Neuroanatomie structurelle et fonctionnelle du trouble déficitaire d’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). L’Encéphale35(2), 107-114.

Ruiz Feliu, M., Cano Prous, A., Iglesias Gaspar, M. T., Campos Mangas, C., & Alvarez Martínez, J. M. (2022, January). Presence and influence of attention deficit hyperactivity disorder symptoms in adults with an eating disorder. In ANALES DEL SISTEMA SANITARIO DE NAVARRA (Vol. 45, No. 1). NAVAS TOLOSA 21, PAMPLONA, 31002, SPAIN: GOBIERNO DE NAVARRA.

Pallanti, S., Salerno, L., Pallanti, S., & Salerno, L. (2020). Adult ADHD in Feeding and Eating Disorders. The Burden of Adult ADHD in Comorbid Psychiatric and Neurological Disorders, 217-234.

Simon-Pezeshknia, E. (2011). Le Trouble Déficit de l’Attention/Hyperactivité (TDAH): agitation des psychiatres autour d’un diagnostic. Comment comprendre les résistances et les réticences (Doctoral dissertation, Thèse de doctorat: UNIVERSITÉ HENRI POINCARÉ, NANCY 1.)

L’amour et la haine de la nourriture

Auteur : Giorgio Nardone
Date de publication : 2017
Editeur : Enrick B. Editions

L’auteur

Giorgio Nardone est un psychothérapeute italien, représentant du Mental Research Institute. Il est également un représentant du courant interactionniste et stratégique, lui-même issu de la fameuse école de Palo Alto. Il a été formé par Paul Watzlawick. Ses compétences et son travail sont de renommée internationale, même s’il reste peu connu en France. Il a particulièrement travaillé sur les problématiques obsessionnelles, mais également sur les troubles alimentaires.
Son approche théorique et technique, à l’instar de Watzlawick, est très intéressante et relativement surprenante par rapport à l’approche traditionnelle française.

Résumé et analyse

Le livre est un ouvrage présentant le référentiel théorique et épistémologique de l’interactionnisme et de la thérapie brève, suivi par une définition des troubles alimentaires majeurs (l’anorexie, boulimie et la proposition de considérer les vomissements comme un syndrome à part entière). La suite du livre propose des cas cliniques de chacune des pathologies et la technique/prise en charge proposée par l’auteur.

Si le titre est accrocheur et peut paraître un peu racoleur, ne nous y trompons pas, la base théorique et épistémologique de l’auteur est particulièrement solide. Elle n’est que peu développée dans ce livre, qui se veut accessible et relativement vulgarisateur. Cependant, les lecteurs qui voudraient en apprendre plus peuvent s’intéresser aux ouvrages Watzlawick, notamment « Une logique de la communication ». Pour autant, quelques mots sur le référentiel proposé par l’auteur.

Interactionnisme et thérapie brève

L’auteur s’appuie sur le référentiel interactionniste issu du courant systémique. Sans rentrer dans le détail, soulignons cependant que l’originalité de cette approche est de se centrer sur le processus, et non pas de construire une théorie causale explicative a priori.
Cet abord est relativement surprenant, puisque la psychanalyse et le cognitivisme, les deux courants majeurs en France, créent plutôt une théorie qui met en lumière une explication du trouble, en se basant sur certains mécanismes défaillants. L’auteur regrette ce type d’approche :

« Il est fréquent de constater que c’est le problème qui doit s’adapter à la solution et non à l’inverse comme cela semblerait logique. A l’évidence une telle approche conduit à la mise au point de techniques thérapeutiques qui pour leur grande majorité respectent la théorie du modèle dont elles sont originaires et non les caractéristiques et nécessités du trouble à traiter. »

G. Nardone

Ainsi, plus qu’expliquer le sens ou la genèse du trouble alimentaire, l’auteur propose de se concentrer sur les processus. Citons-le une fois encore :

« Disons-le autrement, il ne s’agit pas de se préoccuper de la formation d’un problème, mais de sa persistance. »

G. Nardone

Perspective thérapeutique

Un peu plus concrètement, l’auteur propose d’aborder frontalement le trouble alimentaire. En effet, pour lui, il s’agit de trouver un moyen rapide de pouvoir identifier et ainsi mettre en échec le processus qui entretient le trouble. Une fois ce processus modifié et le trouble « débloquer » , les composantes émotionnelles et relationnelles pourront être travaillés.

D’un côté, c’est un véritable positionnement stratégique que promeut l’auteur. D’ailleurs, il s’inscrit parle lui-même de stratégie et fait parfois usage de métaphores liées au duel.

La manière d’aborder le trouble et la communication entre la famille et le patient ou entre le thérapeute est le patient est au coeur de la proposition de Nardone. Pour l’auteur, de nombreuses techniques thérapeutiques se construisent sur une base rationnelle, or la plupart des troubles alimentaires ne sont pas rationnels. Ainsi, il ne peut y avoir de résultats positifs, la communication ne se faisant pas dans la même langue, si l’on peut dire. Globalement, il en est de même pour les proches du patient. Ils veulent aider, mais la plupart de leurs réactions sont inadaptées et contre-productives :

« Pour les proches le comportement de leur enfant est aussi insensé que bouleversant. Leurs tentatives d’intervention apparaissent vraiment raisonnables, mais elles sont inadaptées à l’irrationalité du problème. »

G. Nardone

Enfin, nous pourrions résumer la technique de Nardone, basée sur plusieurs procédés de communication par sa déclaration :

« La manoeuvre consiste en un délicat exercice de persuasion par l’intermédiaire duquel on conduit le patient à avoir peur de ce que jusqu’à maintenant il a dû utiliser précisément pour se protéger de la peur de perdre le contrôle. »

G. Nardone

Quelques situations cliniques

L’auteur va ainsi décrire quelques situations cliniques en décrivant son positionnement et la technique utilisée. Précisons tout d’abord que son objectif est de s’attaquer directement au trouble pour tenter de le modifier. Plus précisément, l’auteur propose à chaque fois quelque chose de surprenant, il crée la surprise auprès du patient ou de ses proches. Plus que de tenter de supprimer le symptôme de manière pur et simple, il s’agit plutôt de détourner l’attention, de modifier l’investissement du patient vers autre chose. La surprise crée une brèche qui permet au thérapeute d’aller sur un autre plan qu’uniquement le plan du symptôme.

Une autre caractéristique se dessine, Nardone est franc, très franc, quitte à perturber ses patients. Dans le même sens que proposé plus haut, cela entretient la surprise.

Il explique ainsi comment, dans le cas d’une boulimie, il demande à une patiente de contrôler le fait de manger davantage et pas de se limiter. Dans le cas d’une anorexie, il invite la mère de la patiente de conforter son enfant et lui disant qu’elle souhaite l’aider dans son anorexie et ainsi lui préparer des repas avec un mot « à vomir pour aujourd’hui ».

Tous les cas cliniques sont dans une certaine mesure déroutants, même pour le thérapeute.

Notre réflexion

La proposition de Nardone est particulièrement intéressante. D’une part, la base théorique et épistémologique est sérieuse et justifie ce type de positionnement. De plus, il y a eu une vraie volonté d’évaluation de ce type de techniques. Elles se présentent comme efficaces.
D’autre part, il permet de sortir du paradigme de la causalité linéaire et d’une explication théorique d’un trouble, ce qui peut se révéler parfois contre-productif dans une prise en charge.

Créer la surprise et proposer des petites techniques originales aux patients peut permettre une autre relation thérapeutique et pour eux, un autre abord de leur situation.

Dosons néanmoins, il est nécessaire de bien tenir compte de chaque situation et de chaque patient. Les propositions de Nardone peuvent parfois être trop directes ou difficiles à entendre de notre avis et ainsi être plus contre-productives qu’aidantes.